Les publications sur l'attitude des jeunes vis à vis du travail ne manquent pas et avec elles beaucoup d'idées reçues : désintérêt pour le travail, sauf si c'est pour une cause noble, repli sur la vie privée, décalage croissant des aspirations avec les autres générations ... L'étude récente publiée par l'Institut Montaigne a le mérite d'examiner plus en profondeur les facteurs qui influencent la perception des jeunes et de mettre en évidence à la fois des enjeux assez "classiques" (aspirations à un salaire décent permettant d'être autonome, besoin de reconnaissance et de relations avec ses collègues satisfaisantes, lien entre acceptation de l'autorité et bien être au travail, impact déterminant de la satisfaction au travail sur son épanouissement personnel ...) et une situation préoccupante : seul 32% des jeunes apparaissent satisfaits de leur travail et du mode de management qui l'accompagne. La "crise" du travail est révélatrice d'un "malaise" profond face à des pratiques managériales perçues dans beaucoup d'entreprises comme inadaptées et démotivantes (contraintes organisationnelles, marges de manœuvre limitées, régulation déficiente des tensions et de la charge de travail ...). Rejeter la responsabilité sur des jeunes "ingérables" ou des managers "débordés" n'aide pas à prendre la mesure du problème auquel nous avons à faire face. L'étude annuelle de l'Institut Gallup nous rappelle que si plus de 30% des salariés américains, tout âge confondu, se déclarent "engagés" dans leur travail, ils ne seraient que 7% en France ...  

Nouvelle édition des Rencontres Economiques d'Aix en Provence, avec comme thème : " Relier les Mondes, vers une réconciliation". Deux jours de réflexion et d'échanges portés par l'optimisme des organisateurs malgré les incertitudes et les inquiétudes du moment. Parmi les thématiques abordées, celles autour de l'entreprise et des relations sociales ont mis en évidence une nouvelle fois les attentes exprimées par les salariés et leurs représentants (inclusion, évolution du mode de gouvernance, partage de la valeur ...) et la volonté d'une grande partie des dirigeants présents d'y répondre. Un des animateurs de table ronde de s'étonner d'un paradoxe : les citoyens expriment de l'impatience et de la colère en grand nombre, alors que dans les grandes entreprises, les salariés semblent davantage confiants dans leurs dirigeants et satisfaits de leur sort. Les disparités de conditions de travail selon les secteurs et la position des entreprises dans la chaine de valeur expliquent sans doute en partie cette situation. Reste que la question du travail, son contenu, son organisation encore trop souvent écartée du dialogue social et professionnel contribue largement à nourrir ressentiment et perte de confiance dans l'avenir. Une étude récente de T. Coutrot (IRES, février 2024) souligne ainsi le lien entre degré d'autonomie au travail et comportements électoraux. Plus que jamais, ce qui se passe dans l'entreprise raisonne en dehors.

Un séminaire organisé par La Fabrique de L'industrie réunissait acteurs et témoins des conditions de l'acceptabilité des projets de réindustrialisation par les territoires. Regards complémentaires d'un Elu local, d'un Chercheur universitaire et d'un Sous-Préfet sur les facteurs clés de succès. La perspective de créations d'emplois et de retombées économiques ne suffisent pas (plus) pour obtenir l'adhésion de l'ensemble des parties prenantes. Vouloir aller trop vite conduit trop souvent à l'échec. Prendre le temps d'une concertation permettant aux acteurs d'être entendus et de pouvoir obtenir des aménagements du projet initial est nécessaire. Au delà, c'est "un désir d'industrie" qu'il faut susciter en balayant les idées reçues et en rassurant sur la maîtrise des risques. Tout se joue en amont, tôt dans le projet, dans la relation de confiance que parviennent à nouer les porteurs du projet et les acteurs du territoire. Ne pas miser sur la démobilisation des opposants, mais co-construire avec les territoires un projet s'intégrant durablement dans leur écosystème.

Marylise LEON, Secrétaire Générale de la CFDT s'inscrit dans la continuité de Laurent BERGER. "La CFDT est le syndicat de la transformation sociale et écologique" affirme t-elle à l'occasion d'une rencontre organisée par RDS. "La question du travail, de son contenu et de l'expression des salariés est centrale". "La CFDT doit s'ouvrir à d'autres formes d'engagement et de contribution de ses militants et pas seulement s'appuyer sur ses élus, représentants du personnel et délégués syndicaux"." Parmi les nouvelles adhésions suscitées par le mouvement d'opposition à la réforme des retraites, 25% de salariés de moins de 35 ans". "le rapport au travail et les attentes des salariés ont profondément changé, dénoncer une grande démission ou le refus de l'effort, est une manière facile d'éviter d'aborder les vrais enjeux : les parcours professionnels, la reconnaissance, la capacité à agir sur l'organisation du travail, les relations managériales ..." "La société idéale ? l'étude récente réalisée avec la Fondation Jean Jaurès, montre que les salariés aspirent à de l'apaisement, plus de prise sur leur temps de travail et la possibilité de mieux travailler, on est loin de l'éloge de la paresse ! ". Le syndicalisme "doit être joyeux" et échanger au delà de la sphère syndicale pour agir avec l'ensemble des parties prenantes.