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Pourquoi faut-il toujours que les grèves durent pour que les négociations avancent ?

Les conflits récents dans l’Energie notamment, illustrent une nouvelle fois la persistance de deux logiques contreproductives qui empêchent les parties prenantes de satisfaire leur intérêt mutuel sans affecter le reste de l’économie.

Les années passent et les mêmes rituels semblent se reproduire immuablement : directions et syndicats semblent inexorablement condamnés à négocier à « chaud »,  en particulier dans certains secteurs  (Energie, Transport, Distribution). Pourquoi est-ce si difficile de négocier à froid, surtout quand le coût économique de la grève est à la fois important pour les entreprises concernées mais également pour tous les autres acteurs ? Un paradoxe bien français qui semble désormais gagner d’autres pays européens, tels que le Royaume-Uni par exemple.

Deux logiques contestables

Deux logiques contestables persistent qui conduisent à des situations où les deux camps qui s’affrontent considèrent légitime de maintenir le plus longtemps possible leurs positions initiales, au détriment de leur intérêt mutuel.

D’un côté un vieux fonds de culture « syndicaliste-révolutionnaire » qui entretien la conviction que rien ne s’obtient sans une lutte préalable. De l’autre une approche « a-syndicale » de plus en plus répandue parmi les directions d’entreprise qui considèrent que céder à la pression sociale est un aveu de faiblesse et une incitation au désordre. Face à des revendications perçues comme excessives et peu compatible avec le « momentum » de l’entreprise, la tentation est grande pour ces directions de vouloir imposer leur propre conception du juste partage de la valeur ou de la politique salariale raisonnable, au regard de la situation conjoncturelle et de la comparaison avec les autres entreprises du même secteur.  Nul sentiment « réactionnaire » ou « ultracapitaliste » le plus souvent derrière cette position, mais la tentation que « toutes les paroles ne se valent pas » et que les directions sont mieux placées et plus compétentes pour apprécier ce qui doit être fait.

Pénuries d'essence

Ainsi, certaines organisations syndicales engagent un conflit pour obtenir l’ouverture de négociation salariale tandis que les directions des entreprises concernées considèrent que le calendrier prévu n’a pas lieu d’être avancé tout en affirmant que « tous les salariés recevront leur juste récompense ». Ainsi, chacun des deux camps semble s’accorder sur le principe qu’il y a « du grain à moudre » selon l’expression consacrée, et pourtant le conflit s’installe dans la durée au risque de perturber de plus en plus le fonctionnement du reste de l’économie.

S'efforcer de négocier à froid

Les deux logiques décrites sont une nouvelle fois à l’œuvre. Quand le leader de la CFDT exprime la réticence de son syndicat à s’engager dans des grèves « préventives » et dit préférer d’attendre que les négociations s’ouvrent pour apprécier l’utilité ou non d’organiser un rapport de force, ce n’est pas pour venir au secours de la direction du groupe TOTAL, mais pour tenter de sortir de ce rituel qui empêche trop d’entreprises de négocier à « froid ».

Il faut pour autant savoir « terminer une grève » quand elle s’est installée, et seule l’ouverture d’une négociation peut permettre d’aboutir à un compromis mutuellement acceptable. Les principes et les « doctrines » des deux camps sont alors souvent mauvaises conseillères : l’amour propre des uns ou l’obsession de ne montrer aucun signe de faiblesse de la part des autres, compromet le travail des négociateurs qui cherchent de manière pragmatique à sortir de l’impasse.

Les syndicats ne sont pas un obstacle à la négociation, ils en sont une des parties prenantes. Les directions d’entreprises ne sont pas nécessairement coupées du terrain ou fermées à toutes avancées dans le partage de la valeur, elles le montrent régulièrement ... mais parfois un peu tard !

Nicolas MADINIER
Dirigeant Fondateur de NMSC Conseil en stratégie sociale et accompagnement de la transformation