Octobre 2024
Jeu vidéo, télétravail et grève : quand la contestation sociale rattrape le game
La jeunesse se désintéresse des syndicats et ne croit plus à l’action collective autrement que pour défendre de grandes causes planétaires, nous rapportent souvent séminaires et colloques consacrés aux nouvelles générations.
Avec le départ à la retraite des « boomers » revendications collectives et conflit sociaux devaient si ce n’est disparaitre du moins fortement décliner. Un ancien dirigeant du MEDEF confessait il y a quelques années que ce n’était plus les syndicats dans l’entreprise qui le préoccupait mais les associations environnementales en dehors.
Nouveaux acteurs syndicaux
Et pourtant, il suffit d’une négociation salariale insatisfaisante et d’une volonté de modérer le recours au télétravail chez Ubisoft (70% de l’effectif a moins de 39 ans) pour qu’un conflit éclate soutenu par les syndicats présents dans l’entreprise parmi lesquels … le Printemps écologique.
Au même moment, l’Union des Syndicats Gilets Jaunes se voit reconnaitre le droit de se présenter aux prochaines élections professionnelles qui concernent l’ensemble des très petites entreprises. « Les syndicats actuels n’intéressent plus les salariés parce que danser régulièrement derrière un camion ne changera pas le système » affirmait récemment l’un de ses représentants. Et d’ajouter : « pour changer radicalement le système il faut s’unir et bloquer les points stratégiques ».
Le social et le sociétal se rejoignent
Ces nouveaux acteurs syndicaux pèsent certes encore peu mais ils soulignent la porosité croissante entre enjeux sociaux et sociétaux. Ils remettent en cause la traditionnelle distinction entre le rôle des acteurs sociaux et politiques sur laquelle le syndicalisme réformiste s’est efforcé de se développer. Une convergence des luttes ? Pas encore et probablement pas à un horizon proche, mais un pas de plus vers une fusion des problématiques (pouvoir d’achat, inégalité sociale et environnement) et une contestation globale du « système ». Si le résultat des dernières élections législatives n’a pas permis de faire émerger une majorité politique, il a cependant mis clairement en évidence l’ampleur de cette contestation.
Les enjeux du télétravail
La remise en cause de la proportion du télétravail dans l’entreprise n’est pas réductible à une question de choix d’organisation, de politique RH ou de préservation du rôle du management. Pour les salariés concernés ce qui se joue souvent c’est davantage la rupture d’un équilibre entre vie personnelle et activité professionnelle. Bien plus que la perte d’un avantage acquis. Le social et le sociétal se rejoignent alors dans une contestation où les enjeux ne sont pas seulement la politique RH, mais également le prix des logements, les modes de transport, les temps de trajets et les aspirations personnelles.
Négociations sociales à risque
Alors que le cycle annuel des négociations salariales se rapproche dans beaucoup d’entreprises, la tentation d’une « reprise en main » de l’organisation du travail et de la politique salariale face au ralentissement de l’inflation, risque de conduire à de nouveaux épisodes de tensions sociales.
Il est difficile pour les entreprises de répondre à court terme à des enjeux qui les débordent et parfois même les fragilisent. Elles peuvent cependant accepter de les reconnaitre et s’efforcer de prendre leur part pour éviter une exacerbation des conflits dans et en dehors de l’entreprise.